Dino Moras
Dino Moras, est un chimiste de formation. Sa thèse de doctorat d’état, soutenue à l’université Louis-Pasteur en 1971, a été consacrée à l’étude structurale des cryptates synthétisés par Jean-Pierre Sauvage dans l’équipe de Jean-Marie Lehn. Il avait auparavant réalisé une première synthèse et caractérisation structurale par cristallographie et spectroscopie Mossbauer d'un hétérocycle entièrement minéral (thèse de 3e cycle, 1968).
Dino Moras est un pionnier de la biologie structurale en France. Après un stage post-doctoral dans le laboratoire du Prof MG Rossmann (Purdue University, Indiana), il entreprend l'étude d’une étape majeure de la traduction du code génétique, l’aminoacylation des ARN de transfert (tRNAs) par les aminoacyl-tRNA-synthétases (aaRSs). En 1980 la détermination de la structure du tRNAASP de levure (deuxième structure atomique d'un ARN de transfert à résolution atomique) a été la première étape d’une recherche qui a culminé dix ans plus tard par la découverte de la partition des aaRSs en deux classes avec la corrélation fonctionnelle associée (chiralité de la cible) suivie par la détermination de la structure atomique du premier complexe tRNA-aaRS de classe II (tRNAASP-aspRS) et la dissection du mécanisme enzymatique. Une retombée de ce projet a été la solution du paradoxe de Pauling, le fait que les synthétases puissent discriminer des acides aminés isostériques comme Thr, Ser et Val avec un taux d'erreur très faible. La structure de la thréonyl-tRNA-synthétase a permis de résoudre l’énigme.
En 1990 il a abordé l’étude d’une autre étape de l’expression de l’information génétique, la régulation de la transcription des gènes par les récepteurs nucléaires des hormones. Ces facteurs de transcription contrôlent la plupart des fonctions physiologiques et sont impliqués dans de nombreuses pathologies. En 1995 les premières structures atomiques des domaines de liaison du ligand (LBD) des récepteurs de l’acide rétinoique (RAR) et de son partenaire moléculaire le récepteur X des rétinoïdes (RXR), ont permis de définir un repliement canonique caractéristique pour cette famille de protéines et d’éclairer le rôle du ligand dans l'activation de ces facteurs. [] Plusieurs autres structures, notamment celle du récepteur de la vitamine D et de l'ecdyzone, spécifique des insectes, ont suivi. Dans une deuxième étape, l’étude des bases structurales du complexe de la transcription contrôlé par les récepteurs nucléaires, il a utilisé les approches intégratives de la biologie structurale, dont la cryo-microscopie électronique pour modéliser l'architecture moléculaire en solution de plusieurs complexes regroupant l'ADN, les récepteurs et leurs corégulateurs transcriptionnels.
Dino Moras a été assistant à l’école de chimie de Strasbourg avant d’intégrer le CNRS en 1969. Il y a obtenu une médaille de bronze (1972) et d’argent (1982). Il est actuellement directeur de recherche émérite et professeur conventionné de l’UNISTRA. Membre de l’académie des sciences, de l’academia Europeae, et membre étranger de l'Académie américaine des arts et des sciences, il est chevalier de la Légion d'honneur et officier de l'Ordre national du Mérite.